Avant-propos

 

INTRODUCTION

 

ETAT DES LIEUX

 

I.    Un édifice lacunaire

 

A.   Une lisibilité satisfaisante

1.     L’aspect extérieur

2.     L’infrastructure

 

B.   Une compréhension moins évidente

1.     Les systèmes de circulation

2.     Les espaces de spectacle

 

II.   Etat des matériaux utilisés

 

A.   Nature du matériau

1.     Analyse macroscopique et cartographie esquissée

2.     Les propriétés induites

 

B.   Diagnostic des causes de l’altération et ses mécanismes

1.     La cause principale d’altération : les sels

2.     Les autres altérations : physiques et biologiques

 

III.  L’utilisation actuelle du monument

 

A.   La prédominance du lieu de spectacle

1.     Des cheminements proches mais divergents

2.     L’importance de la logistique

 

B.   Les dangers inhérents à une telle utilisation

 

1.     Les conséquences dommageables pour le monument

2.     Les conséquences dommageables pour le public

 

LES POLITIQUES D’INTERVENTION A ENVISAGER

 

I.   Les actions de base

 

A.   Les examens préliminaires

 

1.     Les analyses du matériau en laboratoire

2.     Les analyses du matériau dans son contexte

 

B.   Les interventions proprement dites

1.     La guérison : la restauration

2.     La prévention : la conservation

 

II.  L’aspect déontologique des interventions

 

A.   La reprise des solutions antiques

1.     La circulation des personnes et des eaux

2.     Les éventuelles restitutions

 

B.   La question des interventions depuis le dégagement

1.     Un esprit de continuité

2.     Un souci d’harmonisation

 

III. Des particularités à considérer

 

A.   « Valoriser le site en l’utilisant »

1.     Le respect du lieu

2.     Le respect de la fonction

 

B.   Prendre en compte tous les publics

1.     Assurer la qualité de l’accueil

2.     Développer l’information du public

 

CONCLUSION

 

GLOSSAIRE

 

BIBLIOGRAPHIE

1.     Les sources

2.     Les ouvrages

3.     Dictionnaires

 

 



L’amphithéâtre est une structure apparue entre la fin du II°siècle et le début du I°siècle avant Jésus-Christ (av. J.-C.), en Campanie. Cette création architecturale est révélatrice du succès grandissant des combats de gladiateurs et de la vulgarisation de ces jeux, funèbres à l’origine, qui rendaient hommage aux défunts et se déroulaient sur la place du forum. La popularité de ces jeux a donc bientôt nécessité l’érection d’une structure fixe afin d’accueillir les nombreux spectateurs et éviter ainsi les démontages répétés des gradins en bois installés au forum.

L’amphithéâtre est un monument dérivé du théâtre en ce qu’il reprend la même subdivision de la cavea par une distribution régulière des spectateurs et une hiérarchisation de la qualité des places. La filiation avec le théâtre se limite à la forme car, si la qualité de l’acoustique est primordiale au théâtre, à l’amphithéâtre c’est la visibilité qui est importante. De nombreuses recherches ont présidé à l’élaboration de l’arène parfaite qui offre une qualité de vision identique quelque soit sa place : l’ellipse.

Le souci de fonctionnalité, par l’organisation de systèmes de circulation performants, fut résolu avec la création d’amphithéâtres à structure creuse. La pente naturelle du terrain est ainsi compensée par l’érection de murs rayonnants qui viennent soutenir les gradins de la cavea, ménageant ainsi des espaces de circulation par la création de système complexe de galeries annulaires, travées et escaliers d’accès aux maeniana supérieurs. Un autre avantage réside dans sa souplesse d’implantation, quel que soit le terrain. L’aspect esthétique a également été pris en compte puisque cette structure permet l’édification de façades monumentales, comme en témoigne l’amphithéâtre d’Arles encore aujourd’hui.

Ce dernier semble faire partie des grandes réalisations flaviennes (69 à 96 ap. J.-C.) qui ont vu la création des amphithéâtres de Pouzzoles et du Colisée, édifié entre 72 et 80 à Rome. Si la filiation avec celui de Nîmes est évidente par leur ressemblance éloquente, la nature du lien entre l’amphithéâtre d’Arles et le Colisée reste encore l’objet de débats, ce qui ne permet qu’une datation approximative. Cet édifice, qui se situe parmi les vingt plus grands amphithéâtres du monde romain (136x107 mètres), fut donc construit à la fin du I°siècle ap. J.-C., au nord-est de la colonie césarienne Arelate, fondée en 46 av. J.-C., sur les flancs rocheux de la Hauture, dominant le Rhône. (fig.1.)

La configuration du terrain est peut-être à l’origine de sa position oblique par rapport aux axes strictement perpendiculaires de la cité. Sa construction semble, en tous cas, correspondre à une période d’extension de la ville puisqu’elle nécessita le démantèlement d’une partie de l’enceinte primitive. Les documents sont lacunaires quant à la durée d’utilisation du monument pour des jeux, mais l’arrivée du Christianisme ne semble pas avoir mis un terme définitif à ces pratiques. Il fut cependant transformé en forteresse et servit de refuge à la population lors des invasions barbares du VI°siècle. Les tours, encore visibles aujourd’hui, témoignent de cette occupation médiévale qui transforma l’amphithéâtre en une réelle cité. (fig. 2)

Le goût romantique du XIX°siècle pour les édifices antiques fut à l’origine du regain d’intérêt pour ce monument. A partir de 1825, sur l'initiative du Baron de Chartrouse, maire d’Arles, fut décidé le dégagement des deux cent douze maisons édifiées à l’intérieur et contre la façade de l’édifice. Cinq années de travaux permirent d’organiser la première course de taureaux en 1830, pour célébrer la prise d’Alger, redonnant ainsi son identité à l’amphithéâtre par l’attribution de sa fonction première de lieu de spectacle. (fig. 3)

Son classement monument historique en 1840 par Prosper Mérimée marqua le début d’une politique d’intervention jalonnée de campagnes de restaurations, nécessitées par l’état extrêmement dégradé et lacunaire de l’édifice.

L’inscription, en 1981, du patrimoine romain et roman d’Arles au Patrimoine mondial de l’UNESCO, mit en avant le prestige et le caractère exceptionnel de cet héritage, dont l’amphithéâtre fait partie. Néanmoins, depuis une cinquantaine d’années, il ne fait plus l’objet que d’interventions très ponctuelles. Or, sa situation actuelle exige une action globale d’urgence afin qu’il puisse continuer à être utilisé, action difficile à définir face la particularité de cet édifice, à la fois monument touristique et lieu de spectacle.

La politique d’action actuelle consiste à intervenir le moins possible sur le monument, or dans quelle mesure peut-on envisager la conservation, c’est-à-dire le maintien en l’état de l’amphithéâtre d’Arles, sans avoir recours à la restauration, c’est-à-dire à l’amélioration de cet état, exigé par l’usage qu’il en est fait ? En d’autres termes, comment mettre en valeur un édifice aussi singulier, à la double vocation ?

Il apparaît, tout d’abord, nécessaire d’établir un diagnostic de la situation actuelle du monument afin de mieux appréhender la question des interventions et leur étendue.

 



 

Ce diagnostic se base essentiellement sur une appréhension visuelle de l’édifice, hors analyse scientifique. Les questions auxquelles il faut répondre ici sont :

-         Que reste-t-il en place,

-         Dans quel état sont les matériaux,

-         Quel est l’usage du monument actuellement ?

1.  Un édifice lacunaire

Le premier abord de l’amphithéâtre est assez imposant car sa forme générale est très présente dans sa globalité, malgré les visibles dégradations. Cette impression de bonne conservation est également perceptible au niveau de l’infrastructure, mais pour d’autres raisons.

Au contraire, la vision intérieure du monument est beaucoup plus lacunaire et empêche une approche globale.

A.   Une lisibilité satisfaisante

L’aspect extérieur du monument est très endommagé par les agressions de l’environnement, et les restaurations successives offrent une vision hétérogène, cependant l’œil perçoit l’ensemble comme un tout. Au niveau de l’infrastructure, la bonne conservation des matériaux est une réalité, mais cette homogénéité d’ensemble est, par contre, perturbée par une organisation des espaces très irrégulière.

1.    L’aspect extérieur

Ce qui reste en place extérieurement, bien que très détérioré, dégage une impression de majesté et de puissance sûrement assez proche de l’effet d’origine. (fig. 4)

L’environnement actuel y est cependant pour beaucoup puisque le dégagement périphérique du monument, le mettant à bonne distance des premières habitations, ainsi que le majestueux perron nord de 1851, deux opérations dirigées au XIX° siècle par l’architecte Charles Questel, donne de l’ampleur à l’édifice, mais cela sans pouvoir préjuger de la similitude antique. (fig. 5)

La façade, haute de 21 mètres, se compose de soixante travées d’arcades en plein cintre et aux dimensions irrégulières[1], superposées sur deux niveaux et constituées de blocs de pierre taillés en grand appareil,  assemblés à joints vifs.

Chaque arcade est séparée par des piédroits massifs rectangulaires sur lesquels viennent s’adosser des pilastres d’ordre toscan au rez-de-chaussée, et des demi-colonnes engagées d’ordre corinthien reposant sur un petit socle au premier étage. L’architrave, la frise et la corniche séparant les deux étages suivent les décrochements des pilastres et colonnes  en les accentuant, ce qui confère un rythme régulier et un aspect «découpé »[2] à l’ensemble.

Une particularité, que l’on retrouve à Nîmes, est à noter au niveau des voûtes du premier étage dont l’étroitesse semble souligner l’arcade de façade, comme «un arc doubleau »[3]. (fig. 6)

Le haut de l’édifice est lacunaire mais l’on peut supposer la répétition du rythme de l’entablement au niveau supérieur, comme l’évoque deux restitutions du  XIX°siècle et de 1987 sur le coté ouest du monument. (fig. 7 et 8). De même, la présence d’un étage d’attique, aujourd’hui disparu, est confirmée par comparaison avec d’autres amphithéâtres, dont celui de Nîmes notamment. Ce dernier garde encore les traces du système de fixation des mâts du velum  qui était sûrement identique à Arles, bien que rien ne l’atteste sur le terrain.

Parmi les ajouts postérieurs, et encore en place actuellement, les plus visibles et qui donnent toute sa particularité au monument, ce sont les trois tours qui surmontent les portes nord, ouest et est de l’amphithéâtre. Ces témoignages médiévaux de la transformation du monument en forteresse viennent confirmer son occupation tardive, supposée par la présence encore visible de deux murs édifiés entre les arcades supérieures, dans la partie nord-est de l’édifice. (fig. 10).

 Enfin, de manière encore plus récente mais non déterminée dans les archives, des grilles ont été posées entre les arcades au niveau du rez-de-chaussée, empêchant ainsi le libre accès au monument.

Ainsi, d’une façon générale, l’aspect extérieur de l’amphithéâtre est assez hétérogène dans les détails, aspect accentué par les multiples remplacements de blocs créant une rupture dans la lecture. Cependant, dans sa globalité, c’est une impression de relative uniformité qui s’en dégage, peut-être aussi «grâce » à son encrassement général.

2.    L’infrastructure

L’accès aux sous-sols se fait par la travée 60, correspondant à l’entrée nord du monument, qui donne sur une première galerie annulaire en petits moellons. (fig. 9). Celle-ci longe le mur du podium, en suivant sa courbe, et soutient les premiers gradins : c’est la galerie de service (a). Elle est percée de huit portes ouvrant sur l’arène actuelle, anciens sous-sols probablement aménagés pour entreposer la machinerie des spectacles.

Le mur opposé de la galerie est scandé par quelques ouvertures donnant sur des pièces à la fonction indéterminée, qui amènent parfois directement à la seconde galerie ( c), parallèle à la première. Cette dernière, à l’appareillage identique, en bon état de conservation, et également voûtée, n’est pas présente tout autour du monument car le rocher empêche sa progression par endroits, notamment dans la moitié sud de l’amphithéâtre. Elle ouvre, de manière régulière, dans sa paroi la plus proche de l’arène, sur des pièces (b) qui communiquent, une fois sur deux, avec la galerie intérieure du rez-de-chaussée (C), à laquelle elle correspond en sous-sol. (fig. 11 et 12). L’absence de traces évidentes de système de circulation, comme des escaliers, et d’aménagements empêche actuellement de définir la fonction précise de ces pièces. On peut également parfois noter la présence de «gargouilles », dans certaines de ces pièces, permettant probablement l’évacuation des eaux pluviales récoltées au niveau de la cavea, absorbées par le sol perméable[4].

D’autres locaux sont également accessibles par des ouvertures dans le mur opposé, mais leur irrégularité, souvent due à la topographie, et leurs réutilisations successives rendent encore moins lisible leur rôle antique.  C’est à ce niveau de l’infrastructure et dans la partie nord du monument que sont encore visibles les vestiges du rempart augustéen et d’une tour, inclus dans la construction. (fig. 13)

Dans l’axe de la porte nord, une galerie radiale importante relie l’arène actuelle à l’extérieur du monument, par une petite porte latérale dans le perron.

B.   Une compréhension moins évidente

A l'intérieur, on ne constate pas d'aggravation de l'état de conservation des matériaux. La différence se situe dans la difficulté à comprendre la structure, due à la disparition d’une grande partie des aménagements antiques.

1.    Les systèmes de circulation

L’accès actuel, par la porte nord, introduit le visiteur dans la galerie extérieure du rez-de-chaussée, suggérée en façade, et qui ceint le monument, comme un anneau (A).

La vision en élévation est faussée par l’absence quasi totale du promenoir supérieur. En effet, le sol de la galerie du premier étage (B) était constitué de dalles monolithes, formant également le couvrement de la galerie du rez-de-chaussée, or les quelques éléments restants sont dans un état de dégradation avancé, maintenus par des étais métalliques tout aussi bien conservés. (fig. 14). Seule une succession de ces dalles d’origine porte témoignage de l’état antique dans la partie est de l’édifice, état restitué du coté sud lors des réfections d’après-guerre de 1946, sous la direction de Jules Formigé. (fig. 15 et 16). L’originalité de ce couvrement est à noter car il est propre à l’amphithéâtre d’Arles et est peut-être dû au souci de maintenir la régularité de la façade qui, telle quelle, ne permettait pas l’usage traditionnel de la voûte sans modifier la hauteur du premier étage[5]. Cette dernière solution fut, en revanche, adoptée à Nîmes. (fig. 17)

L’amphithéâtre à structure creuse se caractérise, dans son principe, par un système de circulation complexe et développé afin de permettre une fluidité des mouvements et des évacuations rapides, or, l’aspect fonctionnel de ces réseaux a aujourd’hui disparu avec eux.

L’alternance des travées X et Y (fig. 9) est maintenue dans le principe, en ce qu’une arcade sur deux offre un accès direct à la cavea, en traversant la galerie intérieure du rez-de-chaussée, de manière systématique (V1 et V2). Cependant, l’alternance n’est plus respectée puisqu’une grande partie des escaliers d’accès à l’entresol ont disparu, et quand ce n’est pas le cas, ils sont restitués dans un appareillage en pierres ou métallique. (fig. 18 et 19). De plus, cette répétitivité est contrariée sur les travées axiales, nord-sud et est-ouest, afin de ménager des dessertes directes compatibles avec la fonction magistrale de ces portes (défilé de la pompa, accès aux places d’honneur du podium). (fig. 20)

A partir de l’entresol (D), l’accès à la galerie extérieure du premier étage est, quelques fois, restitué. (fig. 21). Les systèmes supérieurs de circulation ont désormais disparu. Seule une partie de l’escalier  menant à l’attique, inclus dans  le mur intermédiaire des travées, est encore visible et permet de supposer l’organisation des réseaux. (fig. 22).Outre ces espaces transversaux ménageant des communications radiales, il existe encore des galeries annulaires horizontales qui sont définies par madame Fincker comme des espaces où s’opèrent les «choix directionnels »[6]. Au niveau du rez-de-chaussée, la galerie intérieure subsiste toujours et est extrêmement utilisée car elle établit le lien entre l’extérieur et la cavea. L’entresol existe encore partiellement en élévation dans sa moitié sud, la partie nord se limitant au niveau du sol.

Peu de choses donc témoignent de la complexe circulation antique, qui évitait aux personnes des différentes classes de se croiser et de se mélanger.

2.    Les espaces de spectacle

L’occupation actuelle de la cavea par des gradins modernes offre au moins l’avantage de comprendre la fonction du lieu, proche de son rôle antique, en revanche, cela ne facilite pas la compréhension des structures qui restent en place et qui sont très lacunaires. (fig. 23 et 24)

De la cavea d’origine, il ne reste que les quatre premiers gradins en pierre de taille, desservis par quatorze vomitoires encore en place et utilisés. Hauts d’environ 50 centimètres et profonds d’environ 90 centimètres, l’assise peut être estimée à 40 centimètres en moyenne, permettant la circulation des spectateurs, et l’inclinaison de la pente restituée à 54,5%[7]. (fig. 25)

Cette première série de gradins (maenianum), appelée aussi podium, est séparée du deuxième maenianum par une double hauteur de gradins, encore visible aujourd’hui et soulignée par un garde-corps métallique qui devait être un parapet en pierre, comme cela est le cas à Nîmes.  

Cette deuxième volée, de dix gradins à l’origine, est suggérée actuellement par la reconstitution à l’identique de quatre rangées de gradins, selon le projet de Revoil de 1861, approuvé et réalisé en 1862. A l’œil nu, la distinction se fait par l’utilisation de petits moellons pour la restauration, qui tranche avec l’appareillage massif. Quatorze vomitoires desservent également cette partie, disposés en alternance avec ceux du premier maenianum.

Ces gradins suivent la forme elliptique de l’arène d’origine et ne s’interrompent qu’au niveau des entrées magistrales nord et sud. L’aspect général n’est pas d’une régularité rigoureuse et, même ces parties les plus «antiques » de la cavea, ont subi diverses restaurations et modifications ponctuelles, comme le comblement de lacunes par des éléments modernes en bois et métal. Les mêmes matériaux ont été utilisés pour l’édification des gradins supérieurs, qui s’élèvent jusqu’au-dessus de l’entresol. Dans la partie inférieure du podium, une autre série de gradins, en bois ceux-ci, vient donner une forme particulière à l’arène, tenant plus de l’ovale que de l’ellipse. Ils se trouvent donc en contrebas du mur du podium, constitué de grandes dalles en pierre dure hautes de 2,36 mètres, soigneusement appareillées à l’origine, et qui séparait la cavea de l’arène antique. (fig. 26)

Un remontage de ce mur, dans la partie sud-ouest de l’édifice, donne une idée de son état antérieur, avec son couronnement arrondi. Les traces d’une inscription monumentale sont encore visibles, rappelant l’évergétisme d’un magistrat local C.Junius Priscus. (fig. 27). La vision de l’amphithéâtre est donc largement modifiée par rapport à son aspect antique, d’autant que le niveau actuel de l’arène semble se situer à environ 2 mètres en dessous de la situation d’origine. Le seuil des quatre portes axiales, s’ouvrant dans le mur du podium, indique un niveau supérieur du sol, confirmé par l’aspect grossier des blocs soutenant ce mur, qui ne devaient pas être visibles. Les traces, au sommet de ces blocs, suggèrent également un système de poutraisons pour soutenir le plancher en bois de l’arène. (fig. 28)

L’état actuel de l’amphithéâtre permet donc difficilement de l’imaginer dans son aspect antique, difficulté que l’état des matériaux utilisés n’atténue pas, loin de là. L’absence de programmes de restaurations générales et la pratique de réparations ponctuelles donnent, en effet, une allure hétéroclite au monument, ce qui ne facilite pas toujours sa lecture.

II.  Etat des matériaux utilisés

Le matériau principal utilisé dans la construction de l’amphithéâtre est, bien évidemment, la pierre. D’autres éléments, annexes, peuvent être considérés comme partie prenante du monument, tels les gradins modernes, mais nous ne les traiterons pas ici.

La pierre étant le matériau le plus résistant de l’époque, il est normal de le retrouver à tous les niveaux de l’édifice : structure et infrastructure. Malgré des dégradations visibles, le fait qu’il soit toujours debout, après presque 2000 ans de péripéties, témoigne de la légitimité de ce choix et de la qualité de la mise en œuvre. Cependant, les dommages sont là, il apparaît donc intéressant d’analyser, en premier lieu, la nature des matériaux utilisés pour mieux appréhender les dégradations et  comprendre les mécanismes de l’altération. 

A.   Nature du matériau

L’analyse est ici réduite à une appréhension visuelle, faute d’études scientifiques préexistantes, par conséquent son exhaustivité peut être sujette à caution. L’aspect extérieur est donc le seul paramètre pris en compte pour déterminer la nature des matériaux utilisés, le degré d’altération servant, le plus souvent, d’indicateur.

1.    Analyse macroscopique et cartographie esquissée

L’édifice semble constitué de pierres de différentes natures.

Les pierres de taille sont visibles au niveau du gros œuvre, c’est-à-dire pour la façade, la galerie extérieure du rez-de-chaussée dans son élévation ainsi que pour la plupart des arcades et portes des galeries et travées. Outre un avantage technique évident pour la construction d’un édifice aussi haut (21 mètres), l’emploi de ces blocs, soigneusement appareillés, était, peut-être, également motivé par un souci esthétique, conférant à l’ensemble une certaine majesté et soulignant les points de passages.

Visuellement, cette pierre a une couleur beige-crème, un aspect assez homogène avec des inclusions de coquillages fossilisés disposés en strates, et un grain qui semble relativement moyen. Il s’agit donc d’une roche sédimentaire, d’un calcaire, dont la provenance ne peut être affirmée avec certitude. Les archives parlent souvent de la pierre de Fontvieille, utilisée aussi au théâtre d’Arles, ou de celle des Baux[8]. Dans tous les cas, les caractéristiques sont similaires et il apparaît logique que l’approvisionnement se soit fait dans une carrière proche, pour des raisons pratiques de transport[9]. De même, les blocs de remplacement utilisés pour des restaurations récentes, parfois très visibles en façade, sont probablement de même nature avec un moindre degré d’altération .

Ce même type de calcaire, facile à travailler, semble avoir été employé dans d’autres parties de l’édifice, notamment pour les parois des galeries annulaires intérieures et travées du rez-de-chaussée, de l’entresol et des sous-sols ainsi que pour l’édification des tours. En effet, la taille et l’appareillage soignés de ces petits moellons tranchent avec l’aspect plus rude de ceux utilisés dans les voûtes de ces mêmes parties. (fig. 29)

 On peut supposer, pour ces derniers, la présence d’un calcaire, puisque les caractéristiques visuelles sont proches des autres pierres, mais de nature plus dure, ce qui expliquerait une taille moins régulière. Leur présence est également à signaler, comme matériau de «fourrage», à l’intérieur des murs des galeries et des travées. C’est la technique de l’emplecton, terme de Vitruve désignant une maçonnerie fourrée (remplissage intérieur), qui est donc composée de ces pierrailles non dégauchies, noyées dans un mortier en même temps que les moellons de parements[10]. (fig. 30). Les gradins restaurés au XIX° siècle du deuxième maenianum  ainsi que les murs médiévaux des arcades, semblent également faits à partir de ce calcaire.

De couleur plus grisée, les blocs des premiers gradins antiques et des emmarchements, ainsi que les dalles du promenoir supérieur semblent plus proches du calcaire dur des petits moellons précédents que des blocs de calcaire coquillé du gros œuvre, malgré une similitude dans la taille en grand appareil.

Enfin, les dalles de parement du mur du podium ont un aspect plus blanchâtre. Ce calcaire, de structure cristalline, rappelle le marbre, ce qui expliquerait son utilisation comme ornement.

2.    Les propriétés induites

Compte tenu de la durabilité des différentes roches en présence, c’est-à-dire de leur résistance aux dégradations, on peut déduire de ces observations des propriétés différentes.

Ainsi, le calcaire coquillé, le plus utilisé sur le monument, semble beaucoup plus sensible à certains types d’agressions, sensibilité peut-être favorisée par une porosité assez élevée et une dureté (résistance à la rayure) amoindrie. Au contraire, sa résistance mécanique aux charges ou aux chocs doit être plutôt bonne, ou devait l’être dans son état d’origine, vu l’usage qu’il en a été fait et l’absence de fissures importantes.

Le calcaire des voûtes et de l’emplecton a une dureté visiblement plus élevée compte tenu de l’état de sa structure, relativement bonne par rapport aux circonstances de sa mise en œuvre. En effet, les voûtes de la galerie annulaire de l’entresol, dans son état actuel, sont soumises à la violence des pluies, or, la pierre en elle-même ne semble subir que des dégradations de surface, ce qui laisse supposer une porosité peu importante. De même, une partie de la structure des gradins modernes repose sur ces voûtes peu épaisses, or, outre une répartition des charges atténuant la compression directe, cela indique cependant une résistance mécanique élevée. (fig. 31)

Enfin, la pierre utilisée pour les gradins antiques, le mur du podium et le promenoir supérieur, doit avoir le degré de compaction le plus élevé. Ainsi, les gradins, par leur utilisation intensive et leur prise au vent et à la pluie, ne sont que peu détériorés, ce qui suppose également une dureté très importante. L’état des dalles du podium et du promenoir est beaucoup plus dégradé mais pour d’autres raisons.

B.    Diagnostic des causes de l’altération et ses mécanismes

 « Tous matériaux placés dans un environnement déterminé tendent à se mettre en équilibre avec lui »[11]. La modification de l’environnement oblige le matériau à se transformer, ce qui aboutit à un changement rapide et évident de ses caractéristiques originelles : c’est l’altération.

1.    La cause principale d’altération : les sels

L’action combinée de l’eau et des sels est ce qui engendre le plus de dégradation sur le monument. Les sels viennent modifier la composition minéralogique de la pierre et l’altèrent par le phénomène de cristallisation saline.

Ce phénomène peut s’expliquer ainsi : la pierre poreuse aspire les molécules d’eau comme une éponge ; ces molécules pénètrent dans les capillaires de la pierre et se déplacent facilement entre ceux-ci en fonction des conditions thermohygrométriques externes ; les sels se dissolvent dans l’eau et lorsque la température augmente, l’eau s’évapore en remontant à la surface ; les sels restent présents dans les capillaires après évaporation ; ils cristallisent, soit en surface (efflorescence), soit au-dessous de la surface (subflorescence), provoquant la désagrégation de la pierre qui se manifeste par une exfoliation de la surface ou un détachement de croûtes superficielles en plaques.

La cristallisation saline est le mécanisme d’altération qui se retrouve sur l’ensemble du monument. Une des conséquences les plus visibles de ce phénomène est l’alvéolisation, principalement localisée sur l’anneau extérieur du monument, en façade et dans la galerie. (fig. 32). A l’intérieur également, de manière moins développée, certains cas sont à signaler, toujours sur des blocs de même nature. Cette dégradation se caractérise par des enlèvements de matière très importants, formant des alvéoles parfois profondes, d’où le nom. Cela donne un aspect de «gruyère » à la pierre subissant ce genre d’altération avec parfois, dans sa forme la plus exacerbée, une désagrégation  du matériau telle que le profil original du bloc disparaît complètement.

Les sels actifs dans ce cas sont essentiellement issus de l’eau de pluie, probablement chargée de chlorure provenant de l’eau de mer pulvérisée portée par les vents, et de sulfates dus à la pollution atmosphérique. Une autre source de sels est à chercher dans le sol, où l’eau de ruissellement ou de la nappe phréatique, chargée de nitrates, pénètre dans la pierre par succion capillaire. Ces deux sources, venant du bas et du haut du monument, expliquent la présence d’un front de capillarité, lieu de rencontre des différents sels, où la pierre est beaucoup plus attaquée que dans les parties périphériques. (fig. 33). L’action du vent, parfois violent sur ce point en hauteur, fonctionne comme un accélérateur de la dégradation, car il creuse la pierre, emportant la surface dégradée, surtout au niveau des strates de sédiments, et les sous-couches attaquées par la cristallisation.

Les premières phases du processus de dégradation donnent un aspect érodé général à tous les blocs de même nature, atténuant ainsi les contours et adoucissant les arêtes qui devaient être vives à l’origine.

L’état de dégradation des dalles du podium et du promenoir, évoqué plus haut, est essentiellement dû à l’ajout de goujons et d’étais en fer. Le fer est un matériau moins stable chimiquement que la pierre, qui se corrode rapidement sous l’effet des changements climatiques, entraînant une augmentation de son volume par formation de couches d’oxydes, d’hydrates ou de carbonates. Cette corrosion provoque la formation de sels solubles dans l’eau qui attaquent la pierre et qui lui donne une couleur rouille typique. Le ciment ajouté, afin d’améliorer l’adhésion au support des dalles du podium , est néfaste pour les mêmes raisons : production de sels hydrosolubles dangereux. (fig. 34 et 35)

Enfin, un autre phénomène d’altération chimique se manifeste par la présence de croûtes noires, qui ont d’ailleurs plutôt l’aspect de coulures, et qui sont présentes de manière très localisée sur l’ensemble de l’édifice. Ainsi, l’endroit le plus visible de leur installation est l’intérieur des arcades du premier étage, sur les voûtes. Or, en y regardant de plus près, on constate leur présence sur l’ensemble des blocs de la galerie annulaire extérieure, que ce soit au rez-de-chaussée ou à l’étage. (fig. 36 et 37). En façade également quelques traces sont visibles mais que dans des parties en retrait, davantage protégées de la pluie qui doit avoir un effet lessivant par rapport à ce genre de dégradation, comme sous la corniche, par exemple. La pollution atmosphérique est à l’origine de la formation de ces dépôts. Ils sont de cohésion et d’adhérence variables, et composés de différentes particules, poreuses ou non, issues de la combustion du pétrole et du charbon, liées par des cristaux de gypse. C’est ce gypse qui est une des principales causes d’altération par les croûtes noires. En effet, il est issu de l’oxydation des composés de soufre, contenus dans l’atmosphère, en acide sulfurique ou en sulfates, qui réagit avec le carbonate de calcium, composant du calcaire, pour donner le sulfate de calcium ou gypse. L’altération par ces croûtes noires est donc provoquée par une corrosion chimique mais aussi par la cristallisation des sels présents dans ces dépôts. Ces mécanismes peuvent être accentués par l’épaississement de cette croûte qui, de ce fait, devient moins poreuse et, donc limite ces échanges avec la pierre, l’étouffant, provoquant des comportements thermiques et mécaniques différents. La désintégration du matériau sous-jacent altéré est très visible dans ce cas car la pierre, plus claire mais « rongée », réapparaît à côté des dépôts noirâtres. (fig. 38)

2.    Les autres altérations : physiques et biologiques

Les altérations physiques les plus visibles sur le monument semblent être dues à la mise en œuvre. L’action de l’homme est donc la plus évidente à ce niveau. En effet, les altérations observées sur le monument de cet ordre, peuvent être identifiées comme les différentes associations de matériaux faites par l’homme au moment de la construction ou des «réparations ». Mais ce sont les écarts thermiques qui sont réellement à l’origine de ces dégradations, par la pression mécanique engendrée.

Les altérations inhérentes à la construction sont visibles surtout au niveau des dalles du promenoir. La pose d’étais en fer, censés les soutenir, les a bloquées de façon rigide et a crée des tensions inhérentes aux différences de dilatation entre les deux matériaux. En effet, la pierre ayant une conductibilité, c’est-à-dire une capacité à propager la chaleur, deux fois moindre que le métal, ce dernier est plus sensible aux variations climatiques et donc se dilate de manière plus importante. Ainsi, ce véritable carcan métallique a entraîné de multiples ruptures, allant jusqu’à l’éclatement de la pierre. L’encastrement des dalles n’a fait qu’ajouter à leur fragilité en créant des tensions supplémentaires. (fig. 39)

Au niveau des dalles du podium, le système de fixation du XIX°siècle par des goujons en fer, a provoqué le même problème de pression mécanique dû à des différences de dilatation et se matérialisant par des fissures et des enlèvements en plaques.

La biodégradation est un phénomène, dû à l’action des êtres vivants, qui peut se définir ainsi : « N’importe quel type d’altération irréversible, conséquence de l’activité métabolique d’un ou plusieurs populations vivantes, quelque soit l’ordre de grandeur des individus qui les composent »[12].

Le phénomène le plus répandu de biodégradation est la micro-végétation localisée sur les voûtes internes des galeries te travées. Compte tenu de l’atmosphère humide et sombre, il peut s’agir d’algues et de champignons microscopiques, producteurs d’acides très corrosifs.

Ainsi, les algues, d’aspect noirâtre ou verdâtre, libèrent des acides qui décomposent le carbonate de calcium du calcaire, c’est pour cela qu’elles se développent essentiellement en périphérie des moellons dont la porosité est inférieure à celle du mortier de chaux qui les lient, véritable garde-manger pour elles. Les champignons, quant à eux, produisent des acides organiques qui forment, avec le calcium, le fer ou le potassium, des sels solubles (acétates, citrates, …) provoquant des efflorescences salines, des tâches colorées ou des boursouflures. (fig. 40 et 41)

Un autre type de micro-végétation, localisé davantage à l’extérieur du monument et caractérisé par ses couleurs vives : les lichens. Ils se développent essentiellement sur le sommet de l’anneau extérieur et ont une action métabolique acide vis-à-vis des blocs calcaires qu’ils recouvrent. (fig. 42)

Les végétaux, s’insérant dans les joints ou les fissures, ont également une action chimique sur les pierres par les acides humides qu’ils libèrent, mais aussi une action mécanique par la croissance des racines à l’intérieur des failles. (fig. 43)

Enfin, un autre agent de dégradation par action chimique est situé dans les excréments de pigeons qui, chargés d'ammoniac, décomposent le carbonate de calcium et réduisent la surface de la pierre en poudre.

III.    L’utilisation actuelle du monument

Un autre aspect qu’il convient d’aborder afin de mieux appréhender la situation de l’amphithéâtre, est son utilisation.

En effet, si sa fonction de lieu de spectacle se perpétue à l’heure actuelle au travers des manifestations taurines et folkloriques, sa qualité de lieu touristique, très visité, introduit une seconde dimension à son utilisation dont il faut tenir compte.

Ces deux aspects de l’usage du monument sont en déséquilibre actuellement et ces pratiques induisent des problèmes non négligeables.

A.   La prédominance du lieu de spectacle

L’observation de la structure et de son occupation semble indiquer une utilisation privilégiée de l’amphithéâtre en tant que lieu de spectacle, fonction première du monument, mais au détriment de l’aspect touristique.

1.    Des cheminements proches mais divergents

Les billetteries sont les premières structures que le visiteur ou le spectateur rencontre lors de sa venue à l’amphithéâtre. Toutes deux situées au niveau de l’entrée nord, seul accès à l’intérieur du monument, elles sont suffisamment proches pour susciter une inévitable comparaison. (fig. 44 et 45)

Si la billetterie des visiteurs se caractérise essentiellement par sa discrétion, cela est dû au peu d’espace dont elle dispose. En revanche, le bureau de location des places de spectacles est visuellement inévitable car il occupe toute la largeur d’une alvéole dans la galerie extérieure du rez-de-chaussée et aborde frontalement le public. Cette installation qui, de toute évidence, est faite pour être vue et reconnue, a le mérite d’offrir un espace de travail suffisamment grand et confortable à son personnel, ce qui n’est pas forcément le cas pour la billetterie des visiteurs, dont la vétusté est notoire.

Une fois les places achetées, il s’agit pour le public de s’orienter dans le monument. Là aussi, les moyens mis à disposition divergent. Pour le spectateur, retrouver sa place rapidement est facilité par une numérotation assez simple des travées de 1 à 60, en commençant par la travée à l’est de la porte nord, un découpage des niveaux de gradins compréhensible et, souvent, une habitude du lieu qui permet une orientation facile. Le visiteur, présent pour la première fois et dont le but n’est pas de trouver une place sur les gradins, se trouve plus démuni dans son approche car il manque d’information. Certes, une plaquette est vendue à la billetterie, permettant d’appréhender historiquement l’amphithéâtre, de le resituer dans son contexte et d’envisager ce qu’il fut, mais la vision actuelle de l’édifice et sa compréhension sont des aspects encore obscures. Or, face à cet ensemble lacunaire, l’imagination requise pour envisager un état originel, malgré des explications, peut faire défaut sans la présence d’indices pertinents sur le terrain. Le seul « parcours » proposé est la visite de la tour nord, pour admirer le point de vue. (fig. 46)

Le déplacement dans les galeries et travées, véritable dédale pour le néophyte, amène inévitablement le public au niveau des gradins, car l’important c’est l’arène, qu’on soit touriste ou aficionado. Le problème se situe ici dans l’évidente inadéquation du système de gradins en place par rapport au monument, à sa mise en valeur et à sa protection. En effet, les gradins situés au niveau de l’arène occupent un espace originellement dévolu à la piste, ce qui modifie sa forme, qui n’est plus elliptique, et soumet le mur de podium aux frottements. De plus, leur installation ne semble pas avoir été prévue pour un usage à long terme, vu les matériaux utilisés et leur agencement. (fig. 47). La structure métallique des gradins supérieurs permet, par contre, une assez bonne lecture de l’ensemble de l’amphithéâtre par un effet de «transparence ». Toutefois, lorsque le visiteur est situé au niveau de l’entresol, dans sa partie découverte, il se retrouve derrière la structure des gradins et sa vision  est gênée par celle-ci. (fig. 48). Certes, ce point de vue était inexistant à l’origine car cette partie était voûtée, mais au regard de la situation actuelle, un compromis s’avère peut-être nécessaire, dans la mesure où il satisferait le plus grand nombre.

Un autre aspect, induit par la prédominance de la fonction de spectacle du monument, est l’important support logistique mis en place pour en assurer le bon déroulement.

2.    L’importance de la logistique

Comme à l’origine, on retrouve l’essentiel de ces structures installées dans les sous-sols de l’amphithéâtre.

Ainsi, de part et d’autre de l’axe nord, se développent des locaux réutilisés en grande partie pour loger les installations nécessaires à l’organisation des spectacles taurins : vestiaires des raseteurs, installations sanitaires, infirmerie, bloc opératoire, et chapelle des toreros. De l’autre coté, dans l’axe de la porte sud, la même galerie radiale semble se développer beaucoup moins profondément, mais elle est à demi enterrée, ce qui ne permet pas une utilisation similaire. Toutefois, le toril y a été installé autour, dans la galerie de service. A ce niveau, des locaux techniques ont également été installés, pour le système électrique notamment, et du matériel mobile, comme des barrières, est stocké de manière aléatoire dans les galeries annulaires.

A l’heure actuelle, cette occupation n’est pas vraiment gênante dans la mesure où les infrastructures ne sont pas visibles dans leur totalité par le visiteur. Dans les visites guidées, seule une partie de la galerie proche de l’arène est visitable. Le reste n’a pas été aménagé pour cela, ainsi le système d’éclairage est parfois inexistant. De plus, l’usage qu’il en est fait doit être assez proche de la fonction antique : cages des fauves (carceres), loges pour les gladiateurs, chapelle (sacellum). L’absence de locaux aménagés sous la piste, comme ce devait être le cas à l’origine, réduit l’occupation des sous-sols à la proximité de l’arène par souci d’accessibilité et de commodité.

De ce fait, une partie de la logistique a été installée au niveau des galeries et travées de la superstructure, l’aménagement y étant plus aisé. Ainsi, des armoires métalliques sont mises dans les passages, des barrières sont entreposées dans les travées, des billetteries mobiles sont installées contre les grilles et des espaces sont réoccupés. De même, le système d'alimentation électrique court le long des murs. (fig. 49 - 50 - 51 - 52).

B.   Les dangers inhérents à une telle utilisation

Ils sont de deux ordres : d’une part, les conséquences néfastes pour le monument et, d’autre part, celles dommageables pour le public.             

1.    Les conséquences dommageables pour le monument

L’état de la pierre, élément fondamental constituant le monument, a été analysé précédemment. Les seuls éléments modernes abordés furent ceux ajoutés à la pierre, comme les étais métalliques.

Par contre, les structures modernes coexistantes avec la pierre sur le monument, non encore évoquées, sont intéressantes à étudier ici car elles entraînent des modifications dans la structure qui peuvent être dommageables.

Ainsi, les gradins, installés pour recevoir les spectateurs en remplacement des aménagements antiques, sont-ils une source importante d’inconvénients aujourd’hui, au-delà de la question esthétique. Outre les problèmes de charge mécanique que font subir les gradins supérieurs aux voûtes de l’entresol, sur lesquelles ils prennent en partie appui, c’est surtout un problème d’entretien et de vétusté qui est ici à noter.

En effet, hors la saison des spectacles tout du moins, les gradins ne sont pratiquement jamais nettoyés. De plus, ils subissent les intempéries et les mauvais traitements du public, d’où un état assez dégradé des structures en bois.

Cette situation est regrettable car, en basse saison, le monument reste ouvert à la visite, ce qui donne une impression de négligence au public.

D’autres ajouts récents viennent perturber la structure du monument, toujours inhérents à sa réutilisation. En fait, c’est moins l’usage des espaces qui posent problème que les conditions de leur aménagement. Ainsi, au niveau des sous-sols, l’infirmerie, les vestiaires ou le toril, ont été faits sans vraiment tenir compte de l’espace antique occupé et en le modifiant pour lui donner un aspect moderne. C’est ainsi que les vestiaires rectangulaires, en matériaux préfabriqués, ont été installés en 1978 dans une galerie annulaire voûtée, l’occultant entièrement. L’aspect utilitaire de ces espaces entraîne également une négligence au niveau de l’entretien qui peut aller jusqu’à la transformation de certains endroits en véritables dépotoirs. (fig. 53)

Le parpaing est également fréquemment utilisé pour diviser les espaces. Cela est à constater au niveau du toril mais également pour boucher certaines alvéoles de la galerie intérieure du rez-de-chaussée. (fig. 54). Or, autant du point de vue esthétique qu’historique, ce type de matériau, utilisé à nu, n’est peut-être pas le plus approprié pour ce genre de monument.

Enfin, au niveau de la galerie extérieure du rez-de-chaussée, de nombreuses alvéoles sont obstruées par des palissades ou des murs en béton et servent à entreposer du matériel. L’une d’elles a même été réaménagée pour y installer des bureaux. (fig. 55 - 56 - 57)

Tout ceci concerne davantage l’amphithéâtre car cela a attrait, en priorité, à sa structure, mais le public subit aussi, plus ou moins directement, ces inconvénients.

2.    Les conséquences dommageables pour le public

Les problèmes que peut rencontrer régulièrement le public ne sont pas forcément les plus graves. Il s’agit essentiellement d’une question de confort et cela, surtout pour le spectateur qui subit, en plus, la foule et la chaleur en période estivale.

En effet, les gradins ne sont pas vraiment adaptés à une station assise prolongée et la visibilité, élément fondamental dans ce type d’édifice, ne doit pas toujours être satisfaisante, surtout pour les spectacles nocturnes compte tenu du système d’éclairage en place actuellement.

Les installations sanitaires n’améliorent pas le bien-être du public, vu leur nombre (3 pour les femmes) largement insuffisant par rapport à la fréquentation, qui est en moyenne de 10000 personnes lors des spectacles, et vu leur vétusté notoire. (fig. 58). Les normes d’hygiène ne sont donc pas vraiment respectées, hygiène que le nombre de poubelles et de points d’eau ne contribue pas à favoriser.

Les questions de sécurité sont autrement plus importantes et lourdes en conséquence pour le public. Heureusement, les accidents sont assez rares mais le danger reste présent. En effet, l’un des principaux inconvénients du monument, ce sont ses vides, très nombreux, et le balisage de ces zones dangereuses reste lacunaire. Ces parties interdites pour éviter une chute ou des zones fragiles de l’édifice, sont matériellement signalées par des chaînettes, agrémentées ou non de petits panneaux «sens interdit », ou par des barres de fer. (fig. 59). Dans les deux cas, ces systèmes empêchent symboliquement le passage, mais la vigilance reste le moyen le plus sûr d’éviter un accident car certains endroits sont presque dans l’obscurité, notamment dans la galerie du rez-de-chaussée.

Lors des spectacles, l’accès à la tour nord, qui permettait au public de s’installer sur les extrados des arcades de l’anneau extérieur, est désormais interdit et l’on comprend pourquoi. Mais, mis à part cette mesure préventive, le visiteur reste libre de son comportement. (fig. 60). Un autre souci relatif à des questions de sécurité est le problème d’évacuation du monument en cas de danger. L’ouverture des quatre portes axiales pour la sortie des spectacles est suffisante en temps normal, mais elle ne permet peut-être pas d’éviter les mouvements de panique et les stationnements prolongés et dangereux dans les galeries. Dans ce cas, l’ouverture des autres grilles mobiles doit être extrêmement rapide.

Ainsi, l’amphithéâtre d’Arles est un monument très lacunaire dont l’utilisation régulière, depuis son dégagement, exige, actuellement, une restauration d’ensemble afin de lui permettre de continuer à exister.

Pour cela, une intervention d’urgence est nécessaire, compte tenu de l’état de dégradation du monument, mais la définition d’une politique d’action est également indispensable, or, nous allons voir que les paramètres à considérer sont très divers, voire divergents.

 


 

 

Il ne peut y avoir une solution toute faite aux problèmes, ni même une seule politique d’intervention envisageable.

En effet, il s’agit de trouver un compromis entre les différents acteurs du projet de restauration (la municipalité, la conservation régionale des monuments historiques et l’architecte en chef des monuments historiques), qui peuvent avoir des intérêts et des objectifs différents, et prendre en compte la particularité du monument.

Comme pour toute intervention sur les monuments historiques, la Charte de Venise de 1964 sous-tend le projet en posant les principes fondamentaux de conservation et de restauration, spécifiques à chaque étape.

I.    Les actions de base

Ces actions sont induites par la nécessité d’intervenir rapidement pour la sauvegarde «physique » du monument, d’où l’attention première portée à la structure.

A.   Les examens préliminaires

« La conservation et la restauration des monuments constituent une discipline qui fait appel à toutes les sciences et à toutes les techniques qui peuvent contribuer à l’étude et à la sauvegarde du patrimoine monumental. » - article 2 de la Charte de Venise

Ces différentes sciences et techniques, contribuant à l’étude du monument, vont permettre, par la connaissance du matériau et de ses altérations, de définir une politique d’intervention sur la structure, la plus appropriée. Celle-ci doit respecter l’œuvre, donc être sans danger, et elle doit également être minimum, donc davantage ralentir les processus d’altération que les stopper.

1.    Les analyses du matériau en laboratoire

Cette étude élémentaire, qui n’a jamais été réalisée, se fait à partir d’échantillons prélevés de chaque type de pierre et des différents éléments d’altération, comme les croûtes noires ou les mousses et algues, par grattage.

Les analyses minéralogiques et pétrographiques effectuées sur le matériau pierreux viennent confirmer ou infirmer les résultats de l’examen macroscopique fait au préalable sur le terrain, ayant permis la reconnaissance des minéraux composant la roche, en l’occurrence des calcaires de différentes natures.

L’examen en coupe au microscope établit la stratigraphie des minéraux qui sont, ensuite, analysés en lames minces au microscope polarisant pour les identifier. On peut ainsi établir la genèse de la roche, la classer et déterminer sa provenance, ce qui, pour l’amphithéâtre, va permettre de vérifier les hypothèses émises dans les archives[13].

Afin d’obtenir des informations sur les mécanismes d’altération, comme pour la pierre, l’examen en coupe au microscope des croûtes noires et des dépôts superficiels permet de visualiser les couches successives, dont la composition est déterminée par analyse au microscope stéréoscopique et électronique à balayage. Le recours aux rayons X est utile pour identifier les phases cristallines de ces dépôts, complément important de la compréhension du processus de dégradation.

Les analyses chimiques sont intéressantes à effectuer pour choisir la technique de nettoyage la plus adaptée, afin qu’elle ne soit pas un facteur aggravant d’altération. En connaissant la composition chimique qualitative et quantitative de chaque matériau utilisé ainsi que des salissures à enlever, le choix du nettoyage pourra être plus pertinent, en fonction des propriétés déduites. Ces propriétés, qui viennent corroborer ou non celles induites par l’observation, donnent des indications sur les capacités techniques des pierres, que des tests particuliers viennent compléter, pour déterminer la densité, la résistance à la compression, à la traction ou à la flexion. Un état de conservation général du matériau peut ainsi être envisagé.

La nature des différents sels présents dans la roche peut également être déterminée par ce type d’analyse, ce qui est très intéressant dans le cas de l’amphithéâtre d’Arles puisque le phénomène de cristallisation saline est une des causes d’altération les plus répandues sur le monument. Une série de tests supplémentaires peut également apporter des compléments d’information, comme la mesure du degré de salinité par rapport à la propriété capillaire de la pierre. Savoir, de manière précise, d’où viennent ces sels et quelle est leur nature, permet de mieux appréhender les différents mécanismes de dégradation et d’envisager les moyens de les enrayer.

L’identification des différentes plantes, algues microscopiques, champignons, mousses ou lichens se fait grâce à des analyses biologiques à partir d’échantillons. Les résultats obtenus vont donc permettre de choisir un biocide adapté à chaque élément dégradant, qui devra être sans danger pour le matériau et l’utilisateur.

Ces différentes analyses, en déterminant les caractéristiques des matériaux utilisés et en définissant les différentes altérations, devraient aboutir à l’établissement d’une cartographie précise de chaque type de pierre et dégradation.

2.    Les analyses du matériau dans son contexte

La nécessaire localisation des différents résultats issus des examens, se fait à partir de relevés sur le monument. Ce travail sur le terrain est complété par l’étude technique de l’environnement qui permet d’évaluer l’influence de celui-ci en tant que facteur causal ou aggravant de la dégradation.

L’étude de l’hydraulique semble être une priorité, pour l’amphithéâtre d’Arles, compte tenu des nombreux problèmes liés à l’eau.

A l’exemple de Nîmes, les chemins d’eau sont à étudier afin de trouver une solution pour maîtriser ce facteur majeur d’altération. La pénétration de l’eau de pluie dans la pierre semble se faire soit directement au niveau des surfaces en contact avec elle, soit par infiltration, au travers de surfaces non étanches, permettant une circulation verticale de haut en bas dans la structure du monument.

Une étude hydrogéologique serait également appropriée afin de mieux analyser les éventuels effets du ruissellement de l’eau de pluie sous le monument et des remontées capillaires, de cette eau et de celle provenant de la nappe phréatique, cette fois de bas en haut.

Une étude géologique peut s’avérer également intéressante. Cependant, il s’agirait davantage d’aborder la morphologie du terrain plutôt que d’analyser sa structure. En effet, celle-ci s’appréhende facilement par les affleurements visibles du côté ouest de l’amphithéâtre, ce qui éviterait le recours à des carottages. (fig. 61). Cette étude topographique pourrait se faire par des sondages géologiques afin de déterminer le profil de la pente et révéler ainsi une éventuelle dépression.

Compte tenu de l’usage du monument, certaines mesures devraient révéler l’incidence technique de son utilisation actuelle sur sa structure. Ainsi, on peut envisager, comme à Nîmes, un relevé des fissures éventuelles, en considérer les causes (poids supporté par les gradins, vibrations inhérentes aux mouvements de foule et aux spectacles, mouvements du terrain) et étudier leur évolution.

Enfin, la mesure du taux de pollution à différents endroits du monument et à différents moments, de la journée et de l’année, est un paramètre intéressant à étudier en ce qu’il révèle, notamment, l’incidence des pluies et du vent comme propagateurs ou dissipateurs de la pollution atmosphérique. Cependant, l’interdiction de stationner autour de l’édifice, depuis 1996, devrait atténuer l’importance de ce problème.

L’outil informatique apparaît approprié pour regrouper les données de ces divers relevés, permettant de réaliser ainsi une modélisation du monument, le faisant évoluer selon les paramètres enregistrés, et de définir une politique d’intervention plus adéquate[14].

B.   Les interventions proprement dites

Certains principes, issus des articles 9 à 13 de la Charte de Venise, donnent un cadre à ces pratiques : principe d’intervention minimum (il s’agit plus de ralentir les altérations que de refaire à neuf, d’où des substitutions réduites au maximum), principes de lisibilité et de réversibilité des interventions.

Toujours est-il qu’il vaut mieux prévenir que guérir, mais lorsque le mal est déjà fait, la prévention passe d’abord par la guérison.

1.    La guérison : la restauration

La première opération à envisager est le nettoyage, intervention délicate car, contrairement au principe posé juste avant, elle est irréversible.

En fait, il s’agit d’enlever les dépôts superficiels, quels qu’ils soient, sans endommager la couche de surface originelle afin de conserver son authenticité à la pierre. Donc, la méthode de nettoyage choisie doit être contrôlable dans toutes ses phases, ne pas produire de matières dangereuses qui pourraient accélérer le processus de dégradation plutôt que de le freiner, ni produire de modifications ultérieures néfastes.

Le plus souvent, des méthodes mécaniques, comme le micro-sablage, et chimiques sont associées. Ces dernières se caractérisent surtout par une action par dilatation ou dissolution des dépôts afin d’affaiblir la cohésion des molécules. La nature des solvants choisis dépend de la composition chimique des dépôts, de leur morphologie, de leur épaisseur et des propriétés des composants de la pierre, d’où l’importance des analyses en laboratoire.

Parmi les agents solvants souvent utilisés, on retrouve l’eau déminéralisée qui, en s’infiltrant dans les pores, dissout le gypse, principal composant des croûtes noires, et provoque un ramollissement des dépôts, faciles à retirer mécaniquement. Ce fut la solution choisie par l’architecte en chef J.P. Dufoix pour la campagne de restauration de 1987 : eau pure associée à un brossage.

Le risque de cette pratique est d’accentuer la cristallisation saline par l’utilisation d’une solution aqueuse. Pour vérifier son innocuité dans le cas de l’amphithéâtre, il suffirait d’analyser les réactions de la pierre traitée ainsi il y a treize ans. Visuellement, en tous cas, le résultat semble satisfaisant, mais une subflorescence reste toujours possible.

Les organismes vivants sont, quant à eux, à éliminer par des produits chimiques, comme des fongicides pour les champignons ou des herbicides pour les végétaux, associés à un nettoyage mécanique. Mais, là encore, les analyses devraient permettre de prendre en compte le degré de dégradation de la pierre afin de quantifier l’intervention.

Le dessalage de la pierre peut également être envisagé comme une forme de nettoyage, or il s’agit là d’une opération qui peut s’avérer plus fastidieuse et coûteuse qu’efficace, surtout sur un monument aussi vaste que l’amphithéâtre. De plus, les sels cristallisés peuvent parfois, dans un stade avancé d’altération, être la seule substance fixant la pierre pulvérulente, ce qui nécessite une consolidation pour éviter la désagrégation du matériau.

Ainsi, la consolidation, qui définit tout «traitement destiné à améliorer les caractéristiques de cohésion et d’adhésion entre les constituants d’un matériau minéral »[15], peut être envisagée avant le nettoyage. En traitement sur place, la difficulté réside dans l’obtention d’une bonne profondeur de pénétration du produit, qui ne doit pas stagner en surface pour éviter de fixer les dépôts ou empêcher la pierre de respirer.

Ce sont donc des traitements qui doivent être choisis après concertation entre les différents acteurs du projet de restauration suivant le niveau des intérêts de chacun. Le coût et la durée du traitement sont des variables tandis que le souci d’efficacité et de neutralité est supposé commun à tous. Mais compte tenu de l'importance de la surface à traiter, des interventions ponctuelles et ciblées seraient peut-être préférables à une action globale, trop longue et qui risquerait de ne pas aboutir.

La substitution est, quant à elle, envisageable pour des éléments très détériorés et à la fonction architectonique importante, comme les clefs de voûtes. (fig. 62). Mais ces nouveaux éléments devront « s’intégrer harmonieusement à l’ensemble »[16]. Le remplacement des goujons en fer, soutenant les dalles du podium, par des éléments inoxydables apparaît indispensable dans la mesure où cela détériore la pierre elle-même. De même pour les mortiers, qui sont, soit dégradants, soit inexistants.

En ce qui concerne les dalles du promenoir supérieur, le problème de substitution est sous-tendu par une question déontologique d’une autre ampleur.

La prévention reste cependant la meilleure solution.

2.    La prévention : la conservation

La prévention est le meilleur moyen d’éviter les problèmes et les campagnes de restauration longues et coûteuses. Le but est de maintenir le monument en bon état afin de prévenir la détérioration.

Parmi les moyens préventifs, l’application de produits de protection peut être envisagée comme un complément au nettoyage, en ce qu’ils protègent la pierre des effets néfastes de l’infiltration d’eau. L’efficacité de ces produits hydrofuges réside dans leur bonne pénétration dans le réseau capillaire en le rendant quasiment imperméable. Comme pour les consolidants, auxquels ils sont souvent associés, la pierre doit pouvoir continuer à respirer en maintenant des échanges avec l’extérieur. Ces produits, qui doivent également être stables chimiquement et réversibles, sont souvent d’application peu aisée et exigent un personnel hautement qualifié or, pour être efficaces, leur application doit être globale sinon cela ne fait que reporter le problème sur les pierres voisines sans le résoudre. Par conséquent, le choix de leur utilisation reste délicat. Un autre inconvénient, et non des moindres puisqu’il suppose l’inefficacité de cette méthode, est que l’application de produits hydrofuges n’est envisageable que si les circulations d’eau dans le matériau sont réduites au maximum, or, les remontées capillaires restent encore un problème à régler.

Ainsi, plus qu’un complément au nettoyage, ces agents de protection peuvent être considérés comme un complément à un autre système préventif qui agit directement sur les causes d’altération et dont le but premier est également de réduire la pénétration de l’eau à l’intérieur de la structure poreuse de la pierre. Le choix des méthodes dépend des résultats des analyses faites sur le terrain révélant les chemins d’eau au niveau des sous-sols et dans la structure. L’une des solutions à envisager serait la mise en place d’un système d’évacuation des eaux général permettant d’assainir les sous-sols. Concernant les remontées capillaires, la mise en place d’un système d’isolation des fondations pourrait s’avérer efficace pour protéger les structures.

Assurer l’étanchéité des zones devenues totalement perméables, est également indispensable. Ainsi, toutes les voûtes mises à nu par la disparition de la structure protectrice des gradins exigent un système de protection radical, les rendant étanches, car si cette opération n’est pas effectuée au préalable, la restauration est inefficace comme on le voit actuellement pour les voûtes restaurées en 1987 qui subissent des infiltrations. (fig. 63)

Un autre facteur de dégradation du matériau réside dans les conditions de son utilisation. La solution paraît simple ici en théorie puisqu’il suffirait de ménager la structure par des aménagements appropriés réduisant l’impact des différentes vibrations dues à l’usage et évitant ainsi l’aggravation des fissures inhérentes. En pratique, savoir ce qui est le plus approprié est une question de spécialiste car cela fait intervenir des paramètres très divers, comme le choix du matériau pour les gradins, aux propriétés les plus adéquates pour supporter les tensions, les intempéries et répondre à des impératifs de sécurité.

Une fois que les mesures de protection ont été prises, le meilleur moyen de conservation reste encore l’entretien régulier de l’édifice, comme le précise l’article 4 de la Charte de Venise : « La conservation des monuments impose d’abord la permanence de leur entretien». (p. XXI) Au regard des archives du Service Départemental de l’Architecture et du Patrimoine, il ne semble pas que l’amphithéâtre d’Arles ait jamais fait l’objet de soins particuliers et le nettoyage se limite actuellement à la remise en l’état des gradins avant la saison des spectacles.

Toutes ces solutions sont, certes, à choisir en fonction de la particularité du monument, mais, dans l’optique d’une politique d’intervention encore plus proche de sa situation, et dans le but d’établir une continuité dans son histoire d’édifice de spectacles, certaines solutions peuvent être cherchées dans le passé de l’amphithéâtre.

II.  L’aspect déontologique des interventions

Dans le cadre de la restauration, la Charte de Venise, dans son article 9, précise qu’ « elle a pour but de conserver et révéler les valeurs esthétiques et historiques du monument et se fonde sur le respect de la substance ancienne et de documents authentiques ». De même, «les apports valables de toutes les époques à l’édification d’un monument doivent être respectés, l’unité de style n’étant pas un but à atteindre au cours d’une restauration » - article 11.

Ainsi, il s’avère primordial de respecter l’histoire du monument, dans un souci d’intégrité ; histoire de l’origine tout d’abord, de sa création antique, et histoire depuis son dégagement au XIX° siècle. Les solutions les plus récentes restent cependant sujettes à caution.

A.   La reprise des solutions antiques

Le but n’est donc pas une reconstitution intégrale du monument tel qu’il devait être dans l’Antiquité, même si la reconstitution, sous forme de maquette ou en images de synthèse, reste un travail indispensable pour appréhender l’édifice dans son état originel et mieux le comprendre. (fig. 64 et 65). Cela permet également d’envisager, sans erreurs historiques, quelques restitutions ponctuelles qui peuvent être souhaitables si elles sont utiles pour aborder le monument et si elles sont visiblement modernes, tout en étant intégrées à celui-ci.

L’esprit dans lequel il a été conçu se perpétue à l’heure actuelle par son utilisation comme lieu de spectacle, fonction primordiale de l’amphithéâtre, et c’est dans cette continuité d’esprit que des solutions sont peut-être à chercher, au-delà de l’aspect purement formel de la restauration.

1.    La circulation des personnes et des eaux

L’essence même d’un amphithéâtre réside dans l’efficacité de son système de circulation, système permettant une fluidité des déplacements et assurant une sécurité maximum au public. L’état lacunaire de l’édifice ne permet pas de restituer les espaces détruits, néanmoins, il est possible de faire coïncider ce qui reste avec les aménagements modernes afin d’assurer une efficacité maximum, notamment en cas d’évacuation rapide.

Cela suppose la multiplication des accès aux gradins, à l’image des 28 vomitoires antiques encore en place, desservant le podium et la partie inférieure du deuxième maenianum (V1 et V2), pratiquement tous utilisés, et des 56 autres aujourd’hui disparus ou non usités, comme l’amorce des vomitoires V3 encore visible dans la partie sud de la galerie d’entresol.

Cette rapidité d’évacuation doit être relayée par une fluidité de circulation dans les galeries et travées, ce qui suppose qu’elles soient suffisamment dégagées et éclairées. Pour éviter des stationnements trop longs et dangereux, la multiplication des sorties de secours peut s’avérer nécessaire. A l’époque romaine, le monument était probablement accessible par les 60 arcades, ce qui permettait aux spectateurs de sortir rapidement. Or, les spectacles de l’amphithéâtre n’étant plus un privilège de citoyen romain, la fermeture des arcades afin de canaliser le flux du public est devenu une nécessité. Toutefois, le système actuel peut probablement être amélioré et adapté pour les cas d’urgence.

L’aspect pratique de l’esprit antique se retrouve également dans l’organisation du système d’évacuation des eaux. Là encore, les aménagements originaux semblent peu avantageux à réutiliser vu ce qu’il reste de la structure. En effet, des conduits d’environ 30 cm de diamètre, creusés à l’intérieur des murs rayonnants, recueillaient l’eau de pluie provenant des escaliers menant à l’attique et au dernier maenianum et la déversaient sur le sol des travées du rez-de-chaussée. (fig. 66 et 67). Ces conduits ont été bouchés par du ciment à l’époque moderne et leur utilisation, tels quels, n’apparaît d’aucune utilité puisque cette partie de la cavea a entièrement disparu. Par contre, en fonction des aménagements choisis pour la restauration, ils peuvent peut-être servir à nouveau pour la collecte des eaux de pluie ou, du moins, inspirer la création d’un système d’évacuation vertical similaire qui est, de toutes façons, indispensable pour éviter les infiltrations. Le principe du déversement de l’eau directement sur le sol du rez-de-chaussée peut cependant être modifié dans un souci de confort du public et de salubrité. Le raccordement à un système d’égouts général, déjà évoqué précédemment, semble envisageable.

Un second système d’évacuation existe au niveau de la première précinction du podium, où une rigole est encore visible. Elle semblerait correspondre avec les «gargouilles » qui déversaient les eaux au niveau des sous-sols[17]. Ce réseau est également cimenté à l’heure actuelle mais sa réutilisation peut apparaître tout à fait plausible, après étude du cheminement des eaux et raccordement à un système général de drainage évitant une inondation des souterrains.

Ces aspects pratiques de la réutilisation de principes antiques peut se doubler d’un aspect beaucoup plus didactique au travers des restitutions.

2.    Les éventuelles restitutions

La restauration d’un état originel dont l’existence est confirmée par la présence de traces éloquentes ou d’éléments encore en place peut être envisagée dans la mesure où ces restitutions sont souhaitables pour la compréhension du monument, et réalisables.

L’une des propositions de l’architecte en chef des monuments historiques, monsieur Perrot, dans son étude préalable, consiste à rehausser l’arène à son niveau antique, soit plus de deux mètres au-dessus de son état actuel, ce qui permettrait de restaurer la forme élégante de l’ellipse originelle, soulignée par le mur du podium. Mais cela impliquerait également le dégagement des gradins installés en contrebas, et donc une nécessaire compensation des places ainsi perdues.

Si cette intervention a un aspect esthétique et didactique avéré, en ce qu’elle donne à voir le savoir-faire des architectes antiques, elle pourrait également offrir des avantages pratiques.

Ainsi, la bonne visibilité, qui est un des soucis ayant présidé à la création du monument amphithéâtre, et qui est toujours une question d’actualité par rapport aux spectacles, serait en partie restaurée par le rehaussement de la piste et le rétablissement de sa courbe d’origine. Cela suppose cependant une adéquation du système moderne de gradins et d’éclairage.

Le second aspect pratique concerne l’espace libéré sous l’arène. Celui-ci devait permettre d’abriter le système technique de machineries et des éléments de décor, or, aucun sondage de cette partie n’a été fait depuis le dégagement du monument puisqu’il fut immédiatement utilisé. L’enjeu de la restitution se situe ici, car si le système de poutraisons soutenant le plancher de l’arène est visible par les traces au niveau du soubassement du mur de podium, les supports verticaux de ce plancher restent inconnus : les fondations étaient-elles en bois ou en pierre comme au Colisée ? Et surtout, en reste-t-il des traces ? Des réponses apportées par les fouilles archéologiques dépendent la possibilité ou non de restituer ce plancher et, du même coup, remet en cause l’éventuelle réutilisation pour des locaux techniques, car, comme le précise l’article 9 de la Charte de Venise, la restauration « s’arrête là où commence l’hypothèse […] ».

La restitution du promenoir supérieur est une restauration également proposée par monsieur Perrot dans son projet. Là encore la décision est délicate.

La vision en élévation de la galerie extérieure depuis le rez-de-chaussée  est actuellement faussée par l’absence quasi-totale du couvrement en dalles monolithes, formant séparation avec le premier étage. Ainsi, le public a une impression d’élan vertical vertigineux, totalement différente du parti initial. Or, il s’avère que ce choix architectural, motivé par un souci de régularité de la façade (les voûtes, comme à Nîmes, auraient rehaussé le niveau du premier étage), a dû montrer ses faiblesses peu de temps après sa réalisation. La réutilisation de ces dalles a dû finir de dépouiller la galerie extérieure du rez-de-chaussée de son couvrement.

Dans un aspect didactique, afin de rétablir la vision antique, il apparaît intéressant d’évoquer le dallage original en respectant les principes posés par l’article 12 de la Charte de Venise selon lequel «les éléments destinés à remplacer les parties manquantes doivent s’intégrer harmonieusement à l’ensemble, tout en se distinguant des parties originales, afin que la restauration ne falsifie pas le document d’art et d’histoire ». Quant aux éléments extrêmement dégradés, leur dépose s’avère indispensable pour la sécurité du public car une chute est toujours possible.

Ensuite, dans quelle mesure cette restitution doit-elle se faire ? Tout le problème est là, car le monument est grand et son recouvrement général risque d’être onéreux. Peut-être qu’un réaménagement de la partie déjà restaurée en 1946 serait approprié, en l’intégrant dans une continuité historique.

B.   La question des interventions depuis le dégagement

Par ce dernier exemple, il est intéressant de constater que le souci de se rapprocher du modèle antique était déjà présent avant et présidait aux interventions précédentes. Cependant, la ligne de conduite actuelle semble plutôt tendre vers une harmonisation de ces politiques d’intervention.

1.    Un esprit de continuité

Dès le dégagement, une remise en l’état s’est avérée nécessaire du fait des dégradations engendrées par l’occupation du monument. Mais si sa réutilisation immédiate a permis de lui redonner vie, d’un autre coté, cette nécessaire utilité a parfois freiné la réalisation de travaux d’importance.

Ce retour à sa vocation de lieu de spectacle a orienté l’exécution des restaurations sur le modèle antique, par souci d’harmonie esthétique et quelquefois technique.

Ainsi, lorsque l’architecte H. Revoil propose en 1861 la reconstruction de quatre rangées de gradins, il signifie explicitement que cette restauration doit se baser sur des parties identiques existantes, donc, conformément à la construction romaine, dans la forme, la position ou la nature des matériaux. Le devis, approuvé le 8 mai 1862, prévoira cependant des petits moellons, en «pierre de Castellete », plutôt que des pierres de taille, probablement pour des raisons financières.

Ce souci de continuité esthétique s’est surtout cristallisé autour de la question de l’arène depuis le début du XIX° siècle, qui met également en exergue les différences d’intérêts qui peuvent survenir à propos de l’usage de l’amphithéâtre. Ainsi, en 1903, le bail de l’adjudicataire des spectacles arrivant à terme, est évoquée la destruction d’une tribune construite à l’intérieur de l’arène avant une nouvelle attribution du lieu. Les protestations qui ont suivi cette décision ont permis, pour la première fois, de définir les problèmes causés par ce genre d’occupation. Ils sont au nombre de trois pour Jules Formigé: dégradation des dalles du podium soumises aux passages des spectateurs et à leurs frottements – rupture de la belle forme de l’ellipse – matériaux utilisés, bois et fer, tranchant avec le caractère grandiose du monument. Ces trois points apparaissent encore en filigrane aujourd’hui, au moment où l’occupation de l’arène est toujours effective.

A partir de 1948, c’est le rehaussement de la piste qui est évoqué et les débats tournent autour de la hauteur de ce rehaussement. A cela, Fernand Benoit, directeur de la XII° circonscription archéologique des antiquités, répond que «la seule façon de remédier à la profondeur anormale de la piste est de reconstituer le plancher à la hauteur où il était à l’époque antique ». Or, après une tournée d’inspection générale en 1960, le projet sera abandonné.

Ce souci du respect de l’Antiquité est donc toujours présent aujourd’hui et fut à nouveau à l’ordre du jour lors de la campagne de restauration de 1987, dirigée par monsieur Dufoix. Son projet de rétablir le sol de l’arène à son niveau antique comprenait également l’attribution du sous-sol ainsi dégagé à la recherche archéologique, puis à des aménagements techniques.

Néanmoins, s’il y a bien un esprit de continuité, en ce que chaque intervention suppose une référence au modèle antique, il n’y a pas de réelle continuité de l’esprit puisque ces mêmes interventions relèvent d’interprétations personnelles, souvent purement formelles.

Ainsi, l’éventuelle réutilisation du système antique d’évacuation des eaux n’a jamais été évoquée alors que le problème des infiltrations s’est posé dès le début. En 1845, dans son projet de restauration, Charles Questel suggérait de combler les voûtes avec du bitume recouvert de gazon, solution désapprouvée par les inspecteurs généraux, messieurs Mérimée et Caristie, car risquant d’aggraver la situation plus que d’y mettre un terme. En 1864, Henri Revoil propose d’en assurer l’étanchéité par une couche de béton.

Jusqu’au début des années 1920, les multiples interventions de consolidation ou de restauration ne semblent plus concerner prioritairement la protection des voûtes, à part la mention d’autres chapes de béton en 1876. En fait, ce sont des travaux de conservation qui vont être entrepris par les rejointoiements successifs des voûtes, jusqu’en 1987. Travail qui est encore à envisager aujourd’hui puisque les joints sont quasi-inexistants au niveau des voûtes de l’entresol, à cause des lessivages à répétition.

2.    Un souci d’harmonisation

A travers la politique actuelle de rationalisation de l’intervention, se fait jour la nécessité qui aurait dû être présente dès le début : le souci de vérité historique par la recherche documentaire et les fouilles, ce qui aurait peut-être permis une plus grande coordination dans les différents projets successifs et une homogénéité dans les interventions.

Ainsi, toutes les questions que nous venons de voir sont encore d’actualité, 185 ans après le dégagement et n’ont toujours pas été résolues.

La mise à jour des plans et la vérification des différents relevés précédents semblent être une nécessité afin d’aborder le monument. En effet, si les informations de base sont erronées, les interventions consécutives risquent d’être également faussées. Ainsi, les relevés que fit Charles Questel au moment du dégagement sont à étudier de près car, notamment au niveau de l’infrastructure, il a mentionné des espaces qui n’ont toujours pas été sondés et qui ne sont pas visibles actuellement[18]. Ces mesures sur le terrain permettraient d’établir des plans tenant compte des particularités du monument, dans ses dimensions par exemple. Les plans actuels sont normalisés en ce qu’ils offrent une régularité du rythme tenant plus de la typologie que de la réalité[19]. (fig. 68). Une étude complète suppose également la pratique de sondages archéologiques afin d’analyser le système de fondation antique, les techniques de construction et de découvrir les différents stades d’occupation avant l’érection du monument. En 1946 et 1950, des fouilles du coté nord-est ont mis au jour une partie de l’enceinte augustéenne et les vestiges d’une tour, déjà mentionnés par Charles Questel, et qui témoignent d’une modification de l’urbanisme pour permettre la réalisation de cet édifice monumental. La découverte, à la même époque, de céramiques de la période flavienne (70-90 ap. J.-C.) est venue confirmer la datation du monument, qu’une étude stylistique apparente au Colisée de Rome, inauguré en 80 ap. J.-C. par Titus.

A part une autre campagne de fouilles en 1976-1980, apportant témoignage d’une occupation tardive du monument, depuis une cinquantaine d’années, les sous-sols n’avaient plus été sondés. A la demande de monsieur Perrot, deux sondages ont été réalisés en 1998-1999, sous la direction de messieurs Heijmans, Bremond et Pitou de l’Institut de recherche sur la Provence antique, dans le cadre du projet de restauration actuel. Celui réalisé sur la travée 8 (nord-est) semble réfuter la théorie selon laquelle le terrain aurait été arasé systématiquement avant la construction. En effet, la stratigraphie démontre une occupation antérieure et une utilisation du sol de l’époque comme support de construction.

Ces différentes prospections amènent à une étude exhaustive venant compléter les autres analyses scientifiques, offrant ainsi une base de travail solide.

La prise en compte de la particularité du monument, condition sine qua non d’une politique d’intervention adéquate, révèle, d’une manière plus large, l’aspect particulier de ce type de monument.

III.  Des particularités à considérer

Les développements précédents ont essayé de montrer à quel point ces monuments historiques, par leur utilisation, sont effectivement à part, et que, par conséquent, les problèmes qui se posent exigent des réponses adaptées. Ces particularités ont été récemment reconnues par l’Europe de la coopération culturelle qui, lors du Colloque international de Vérone en août 1997, a élaboré une charte européenne sur l’utilisation des lieux antiques de spectacle.

Ce texte met justement l’accent sur les questions de collaboration des différents intervenants dans le sens d’une valorisation de ces édifices de spectacle par leur utilisation et la prise en compte de tous les publics. Ainsi, pour trouver cet équilibre, les aspects fonctionnels, esthétiques et didactiques sont à considérer.

A.   « Valoriser le site en l’utilisant »

Il s’agit, en quelque sorte, de joindre l’utile à l’agréable. Comme le précisait déjà l’article 5 de la Charte de Venise de 1964 : « La conservation des monuments est toujours favorisée par l’affectation de ceux-ci à une fonction utile à la société […] ». (p. XXII). Mais la notion essentielle qui sous-tend ce principe est le respect de l’édifice.

1.    Le respect du lieu

Le respect des règles de sauvegarde et de protection lors des représentations devrait être envisagé afin d’assurer la sécurité du monument. Cela suppose une définition des règles de bon usage de l’amphithéâtre, par concertation entre la municipalité, propriétaire, les responsables de la conservation et les organisateurs de spectacles afin de réduire au maximum les risques de dégradation matérielle des structures antiques.

Ainsi, le dégagement du matériel technique encombrant les galeries du sous-sol et les niveaux supérieurs, et leur regroupement en des lieux adaptés, permettraient d’éviter des dégradations dues à la manipulation et au stockage de ces éléments, tout en rendant le monument plus attractif car plus dégagé.

En revanche, la mise en place d’un système de gradins provisoires n’est pas forcément une solution utile car cela suppose des moyens logistiques importants alors que le plus haut taux de fréquentation touristique correspond avec la saison des spectacles. De plus, l’adaptation de ce système pourrait même offrir une protection supplémentaire au monument au lieu d’être un facteur de dégradation, par exemple, en jouant un rôle dans le système d’évacuation des eaux. Par conséquent, à défaut d’équipements temporaires, leur entretien régulier, été comme hiver, serait souhaitable pour éviter les altérations et offrir une image agréable de l’édifice au visiteur, quelle que soit la saison. La création d’une équipe d’entretien permanente, attachée à la municipalité, pourrait assurer le nettoyage courant et, peut-être travailler en collaboration avec le Service Départemental de l’Architecture et du Patrimoine pour des interventions un peu plus lourdes, comme le désherbage.

2.    Le respect de la fonction

Respecter la fonction de spectacle et la vocation touristique du lieu, passe par la mise en place d’équipements adaptés et neutres.

Ainsi, puisque la structure des gradins fait partie intégrante de l’amphithéâtre, il serait intéressant qu’elle permette à la fois une bonne visibilité des spectacles ainsi qu’une lisibilité du monument satisfaisante pour le visiteur, et cela, en créant une harmonie esthétique par une continuité visuelle.

De même, la mise en place d’un système d’éclairage performant et adapté, renforcerait la qualité du spectacle à travers la valorisation du site.

Enfin, il est important de prendre en compte les besoins logistiques du personnel et ses conditions de travail car des aménagements adéquats peuvent améliorer ceux-ci tout en respectant le patrimoine, que ce soit pour les personnes de la billetterie ou celles participant à l’organisation des spectacles.

B.   Prendre en compte tous les publics

Visiteurs et spectateurs ont droit au même traitement et cela suppose l’amélioration de l’accueil ainsi que le développement de l’information du public.

1.    Assurer la qualité de l’accueil

Cet accueil passe d’abord par un système de billetterie plus satisfaisant et attractif, capable de faire face à la fréquentation importante du site en haute saison et d’offrir au visiteur un premier contact agréable avec le monument, tout au long de l’année.

Il faut également souligner le problème d’accessibilité du monument, permettant une fluidité de circulation et améliorant la sécurité en cas de danger nécessitant une évacuation rapide. Cette accessibilité doit évidemment prendre en compte le public handicapé, ignoré à l’heure actuelle, qu’il s’agisse de personnes à mobilité réduite ou à déficience visuelle, par la mise en place de rampes d’accès adaptées et de signaux tactiles jalonnant les espaces de circulation.

Cela renvoie donc au respect de normes de sécurité à définir pour l’amphithéâtre, en considérant sa configuration et les lacunes dans ce domaine. Ainsi, il peut s’agir d’améliorer l’éclairage des galeries et le balisage des zones dangereuses pour le public et pour le monument, car trop fragiles, ou de faciliter l’accès et le travail des équipes de secours par un matériel suffisant et en bon état sur place. Mais cela peut également passer par la prise en compte de la capacité d’accueil du public pour éviter une surfréquentation néfaste et la mise en place d’un dispositif d’encadrement du public afin de prévenir tout risque supplémentaire dommageable pour les personnes, par des situations physiquement dangereuses, ou pour le monument, par des dégradations.

2.    Développer l’information du public

Cette étape est très importante car améliorer la connaissance de l’édifice est déjà un premier pas vers le respect, par la prise de conscience. Il serait donc utile de mettre en place une campagne de sensibilisation auprès de la population locale, et notamment du jeune public, pour qui l’amphithéâtre, ou les arènes, fait partie intégrante de la vie quotidienne.

Dans une optique purement touristique, le manque d’information sur le terrain peut gêner le visiteur. Ainsi, le succès des visites conférences mensuelles, organisées par l’Office de Tourisme, à partir de février, témoigne de l’importance de la demande du public face à une offre trop rare. En effet, en haute saison, les visites guidées se limitent à une heure par jour, quel que soit le nombre de visiteurs, ce qui peut être vite insupportable quand les groupes sont trop nombreux ou frustrant lorsque l’horaire est passé. Une collaboration avec l’Office de Tourisme pour préparer un programme de visite plus étoffé et plus flexible serait peut-être une solution. La mise en place de circuits permettant de découvrir librement le site au travers de son histoire serait opportun. Ainsi, aborder son utilisation antique et sa réoccupation médiévale par des cheminements appropriés supposerait, notamment, l’aménagement des sous-sols à la visite, ou une mise en valeur plus importante des tours, trait quand même caractéristique de l’amphithéâtre d’Arles. La présence de panneaux explicatifs qui jalonneraient le parcours peut être envisagée à la condition qu’ils n’«encombrent» pas les passages lorsque le monument est utilisé. Ils peuvent également être mobiles, évitant ainsi une trop rapide dégradation.

La création d’un espace « librairie », regroupant des instruments informatifs complémentaires et spécialisés, tels que livres, maquettes ou CD-roms, permettrait de resituer le monument dans un ensemble et d’offrir un support culturel attractif. La localisation de cet espace est, en revanche, plus problématique et les différentes opinions à ce sujet se défendent. Ainsi, d’un coté, l’installer à l’intérieur de l’amphithéâtre offrirait une proximité permettant une confrontation immédiate avec le lieu, et donc une compréhension plus aisée. Mais cela ne va-t-il pas engendrer un encombrement supplémentaire inadéquat ? D’un autre coté, situer cet espace à l’extérieur, entre le théâtre et l’amphithéâtre par exemple, serait une sorte d’étape informative dans le parcours antique de la ville. Toutefois, le risque est de créer un phénomène de « double-emploi » avec le Musée de l’Arles antique qui est déjà un support culturel à l’appréhension de la ville par ses monuments. Le choix est donc délicat.

Enfin, l’adjonction d’une boutique de souvenirs ou d’un café n’est pas une nécessité en ce que ces deux structures abondent déjà autour du monument et que les cafés offrent un point de vue sur l’extérieur de l’amphithéâtre tout à fait agréable. Penser à un système de buvette plus adapté lors des spectacles semblent être plus en rapport avec une réalité d’utilisation.

La question de l’avenir de ces édifices est donc d’actualité.

 


 

Aborder les problèmes de conservation et de restauration de l’amphithéâtre d’Arles a donc permis de montrer les limites à l’utilisation de ce type d’édifice, limites à ne pas franchir afin de sauvegarder le monument même. Eviter les situations extrêmes et les comportements à risques sont les principales solutions à envisager pour que ces monuments historiques soient toujours utilisés tout en étant protégés.

Le maître-mot à retenir est peut-être celui de respect : respect du monument, respect du public et respect des intérêts de chacun. Or, les désaccords récurrents entre les différents intervenants, apparus dès la réutilisation de l’amphithéâtre, ont, en fait, le plus souvent mené à des actions stériles, car rarement acceptées à l’unanimité.

La quatrième partie de l’annexe I de la Charte de Vérone de 1997 propose « l’établissement de codes négociés de bonne pratique adaptés à chaque site ». Mais, au-delà de ce cahier des charges définissant les conditions d’utilisation de l’amphithéâtre, la création de règles générales et supérieures peut s’avérer utile pour faciliter la gestion du fonctionnement du monument, qui résulte actuellement d’un état de fait imposé par la nécessité d’organiser des spectacles, et cela depuis 1830. Or, il apparaît, au travers de la Charte de Vérone, que cette situation ne soit pas spécifique à l’amphithéâtre d’Arles et qu’une législation particulière pour les édifices antiques de spectacle soit peut-être envisageable.

Considérer le caractère exceptionnel d’amphithéâtres comme celui de Arles ou de Nîmes, les seuls à être aussi bien conservés en élévation en France, c’est également faire un pas vers une autre approche de ces édifices. Ainsi, resituer l’amphithéâtre d’Arles dans un contexte plus large de prise en compte du patrimoine romain à travers l’Europe peut permettre de partager les connaissances et les expériences de chaque pays dont les problèmes sont suffisamment proches pour que les solutions soient riches en enseignement. Mais cela ne doit pas occulter le fait que, Arles et son amphithéâtre s’inscrivent dans un patrimoine propre à la Provence antique. C’est donc, avant tout, un témoin de la civilisation romaine en Narbonnaise, au même titre que celui de Nîmes, ou que d’autres monuments et sites gallo-romains . La mise en place d’un programme inter-régional de restauration, conservation et valorisation de ce patrimoine permettrait un travail de proximité et donc des actions plus ciblées, auxquelles l’Institut de recherche sur la Provence antique d’Arles offrirait une coordination scientifique et technique.

 



 

Carcer (plur. carceres) : pièce où les animaux étaient enfermés peu de temps avant d’être lâchés dans l’arène.

Cavea : partie annulaire et concave de l’amphithéâtre constituée par l’ensemble des gradins et leur structure de support.

Forum : place publique romaine qui était le centre administratif, religieux et commercial de la ville.

Maenianum (plur. maeniana) : portion annulaire de la cavea de l’amphithéâtre rassemblant une série de gradins.

Podium : partie inférieure de la cavea ne comprenant que quelques gradins où prenait place les personnes de marque.

Pompa : défilé des dignitaires dans la ville et dans l’arène avant le début des jeux.

Précinction (Praecinctio -plur. praecinctiones): étroite zone de rupture dans la pente générale des gradins correspondant à un espace de circulation séparant deux maeniana successifs.

Sacellum : chapelle qui pouvait être dédiée à Mars, Hercule, Diane ou Némésis.

Velum (plur. vela) : ensemble des voiles de lin que l’on tendait au-dessus du public pour le protéger du soleil.

 

 

Ce glossaire est librement inspiré de celui proposé par Golvin (J.C.) et Landes (C.) dans Amphithéâtres et gladiateurs, 1990, p. 232-233.

 

 


 


1.       Les sources

    ¨     Sources manuscrites

§         Archives de la Bibliothèque du Patrimoine, Amphithéâtre d’Arles : 1823-1993, Paris.

§         Archives de la Conservation régionale des Monuments Historiques de la Région PACA, Aix-en-Provence.

§         Archives du Service Départemental de l’Architecture et du Patrimoine, Amphithéâtre d’Arles : 1984-1997, Arles.

§         Archives municipales, Amphithéâtre d’Arles : 1825-1982, Arles.

    ¨     Sources imprimées

§         FINCKER Myriam, Analyse comparée des amphithéâtres d’Arles et de Nîmes, Doctorat d’Université sous la direction de Pierre Gros, professeur à l’Université de Provence, Aix-en-Provence, 1989.

§         HEIJMANS Marc, BREMOND Jacques et PITOU Jean, Rapport des fouilles de 1998-1999, Institut de Recherche sur la Provence Antique, Musée de l’Arles antique, Laboratoire d’archéologie, Arles.

§         PERROT Alain-Charles, Amphithéâtre : conservation, mise en valeur et utilisation du monument ; Etude préalable, Département des Bouches-du-Rhône, Arles, juin 1998.

    ¨     Sources orales

Il apparaît plus pertinent d’évoquer les sources orales par ordre chronologique des entretiens, plus représentatif de l’évolution de mon travail, que par ordre alphabétique.

§         SINTES Claude, Conservateur en chef des musées d’Arles.

§         SABEG Bouzid, Directeur du service du Patrimoine de la ville d’Arles.

§         QUENEE Bernard, Ingénieur au Laboratoire d’Etudes et de Recherches sur les Matériaux, Arles.

§         FINCKER Myriam, Architecte à l’Institut de Recherche de l’Architecture Antique de Pau.

§         HEIJMANS Marc, Archéologue à l’Institut de Recherche sur la Provence Antique, Musée de l’Arles antique.

§         SIMON Jean-Christophe, Conservateur régional des Monuments Historiques, Aix-en-Provence.

2.     Les ouvrages

¨     Généralités sur le monde romain

                  Ø                 La civilisation

§         GROS Pierre, La France gallo-romaine, Paris, Nathan, 1991.

                  Ø                 L’architecture        

§         ADAM Jean-Pierre, La construction romaine : matériaux et techniques, Paris, Picard, 1984.

                  Ø                 Les amphithéâtres

§         Dossiers Histoire et Archéologie, Les amphithéâtres de la Gaule, Quétigny, Fatou, n° 116 mai 1987.

§         GOLVIN Jean-Claude, L’amphithéâtre romain : essai sur la théorisation de sa forme et de ses fonctions, Paris, De Boccard, 1988.  

§         GOLVIN Jean-Claude et LANDES Christian, Amphithéâtres et gladiateurs, Paris, Presses du CNRS, 1990.

§         GRENIER Albert, Manuel d’archéologie gallo-romaine : troisième partie, l’architecture – Ludi  et circences - théâtres, amphithéâtres et cirques, Paris, Picard, 1958.

    ¨     La pierre

§         BEDON Robert, Les carrières et les carriers de la Gaule romaine, Paris, Picard, 1984.

§         DOMASLOWSKI Wieslaw, La conservation préventive de la pierre, coll. Musées et monuments – XVIII, Paris, UNESCO, 1982. 

§         LAZZARINI Lorenzo et TABASSO Marisa Laurenzi, La restauration de la pierre, Maurecourt, ERG, 1989.

§         PHILIPPON Jacques, JEANNETTE Daniel et LEFEVRE Roger-Alexandre (coordonné par) , La conservation de la pierre monumentale en France, Paris, Presses du CNRS, 1992.


§        Faut-il restaurer les ruines ? , Actes du Colloque de la Direction du Patrimoine de novembre 1990 à Caen, Paris, Picard, 1992.


    ¨     Arles

                  Ø                 La ville

§         CONSTANS Léopold-Albert, Arles, Paris, Les Belles Lettres, 1928.

§         HEIJMANS Marc et SINTES Claude, «l’évolution de la topographie de l’Arles antique. Un état de la question. », Revue Gallia,  Fouilles et monuments archéologiques en France métropolitaine, Paris, CNRS, tome 51, 1994, p. 134-170.

§         SINTES Claude et MOUTASHAR Michèle, Musée de l’Arles antique, Arles, Actes Sud, 1996.

§         ROUQUETTE Jean-Maurice et SINTES Claude, Arles antique : monuments et sites ; Guides archéologiques de France, Paris, Imprimerie Nationale, 1989.

                  Ø                 L’amphithéâtre

§         FORMIGE Jules, «l’amphithéâtre d’Arles », Revue archéologique, sous la direction de Raymond Lantier et Charles Picard, Paris, Presses Universitaires de France, tome II (juillet-décembre), 1964, p. 114-163, tome I (janvier-juin), 1965, p. 1-46.

§         Arles, objectif Patrimoine, Centre d’études et de recherches sur l’architecture et l’urbanisme, publié sous l’égide de la Conservation régionale des Monuments Historiques de la région PACA, Ministère de la Culture et de la Communication, 1989.

3.     Dictionnaires

§         GINOUVES René, Dictionnaire méthodique de l’architecture grecque et romaine, Ecole française d’Athènes et Ecole française de Rome, tome I, matériaux, techniques de construction, techniques et formes du décor, 1985, tome II, éléments constructifs : supports, couvertures, aménagements intérieurs, 1992, tome III, espaces architecturaux, bâtiments et ensembles, 1998.

 



[1] Irrégularité déjà signalée par Constans (L.A), 1928, p.44, évoquée par Grenier (A.) en 1958 et confirmée par Golvin (J.C.), 1988, p. 186, avec des mesures précises donnant une moyenne de la hauteur et de la largeur des arcades. 

[2] Golvin (J.C.), 1988, p. 186.

[3] Idem.

[4] Mention de ces « gargouilles » par Formigé (J.), 1964, p. 134.

[5] Fincker (M.), 1989, amphithéâtre d’Arles, la structure, tome 1,   

[6] Fincker (M.), 1989, amphithéâtre d’Arles, le fonctionnement, tome 1.

[7] idem.

[8] Blanc (A.) et Lorenz (C.), La conservation de la pierre monumentale en France, 1992, p. 41 : ils parlent de « pierre du Midi ».

[9] Benon (R.), 1984, p. 86.

[10] Adam (J.P.), 1984, p. 80.

   Fincker (M.), 1989, amphithéâtre d’Arles, la structure, tome 1.

[11] Lazzarini (L.) et Tabasso (M.L.), 1989, p. 13.

[12] Lazzarini (L.) et Tabasso (M.L.), 1989, p. 33.

[13] Voir p. 13.

[14] Cette visualisation d’ensemble en images de synthèse a déjà été proposée par mademoiselle Fauquet, dans le cadre d’études à l’école d’architecture de Marseille-Luminy.

[15] Lazzarini (L.) et Tabasso (M.L.), 1989, p. 143.

[16] Extrait de l’article 12 de la Charte de Venise de 1964, p. XXII.

[17]Voir p. 9.

[18] Voir fig. 13, p. IV.

[19] Malgré la régularité de son plan, monsieur Golvin a cependant noté l’irrégularité des formes. Golvin (J.C.), 1988, p. 186.